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Le Maroc fait son retour dans l’Union africaine

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[dropcap]R[/dropcap]éunis à Addis Abeba, les chefs d’Etat de l’UA se sont prononcés en faveur du retour du royaume dans l’organisation. Malgré les réserves de l’Algérie en raison du conflit sahraoui.

Ils ont tellement œuvré en ce sens qu’ils savourent leur victoire. Dans le luxueux hôtel Sheraton d’Addis-Abeba, lundi 30 janvier, les diplomates marocains ne cachaient pas leur joie après l’annonce de la décision des présidents africains réunis pour le 28e sommet de l’Union africaine (UA) : le Maroc sera bien le 55e membre de l’organisation panafricaine. Une annonce qui vient couronner une intense politique africaine du royaume mais qui n’aura pas été facile à obtenir.

 

Jusqu’au dimanche 29 janvier, l’incertitude demeurait sur l’issue des débats. Le Maroc a annoncé en juillet 2016 son intention de réintégrer l’organisation panafricaine qu’il avait quittée en 1984 – l’UA était alors l’Organisation de l’unité africaine (OUA) – après la décision de l’institution de reconnaître la République arabe sahraouie démocratique (RASD), à qui il dispute la souveraineté sur le Sahara occidental. Si une majorité de pays membres s’étaient rapidement dits favorables à ce retour, plusieurs poids lourds du continent dont l’Afrique du Sud et l’Algérie y étaient réticents au nom de la défense du droit à l’autodétermination du peuple sahraoui.

 

Lundi, les discussions ont eu lieu à huis clos entre chefs d’Etat et se sont poursuivies jusque dans la soirée. Selon le président sénégalais, Macky Sall, trente-neuf Etats étaient favorables au retour du Maroc, sans conditions, tandis qu’une dizaine d’autres ont exprimé des réserves. « La coupure était nette entre les pays d’Afrique australe, les plus réticents, et ceux d’Afrique de l’Ouest et du Centre », souligne une source diplomatique, qui parle de débats intenses. L’Algérie, l’Afrique du Sud et l’Angola – farouchement anticolonialistes – ont été en première ligne pour obtenir un retour sous conditions. L’une de leurs propositions était la mise en place d’un comité pour accompagner l’entrée du Maroc et veiller au respect des principes de l’UA.

 

Victoire pour le royaume

 

La décision a finalement été prise par consensus, sans vote. « Il y a eu une vraie volonté d’Alpha Condé [le président guinéen nouvellement élu à la tête de l’UA] d’arriver à un consensus », explique un fonctionnaire de la commission de l’UA, selon lequel le président guinéen aurait mis « l’Afrique du Sud et l’Algérie “au pied du mur” en leur demandant de se positionner formellement pour ou contre l’adhésion ».

 

Cette issue est une victoire pour le Maroc. Elle intervient après plus d’une décennie d’offensive diplomatique tournée vers le continent africain et portée en grande partie par le roi Mohammed VI, au fil de longues tournées sur le continent, d’importants investissements et d’accords de coopération. Elle ouvre toutefois une période d’incertitude pour l’Union africaine. « Nous espérons que le Maroc va tendre la main à la RASD », souligne un membre de la délégation mauritanienne, exprimant à demi-mot une inquiétude partagée par de nombreux pays.

 

Officiellement, le Maroc réintègre l’UA sans conditions, mais le royaume n’a pas changé de politique sur le Sahara occidental : il occupe 80 % du territoire sahraoui, qu’il considère comme ses « provinces du Sud », et refuse de reconnaître la RASD. « S’agissant de l’UA, le Maroc a d’abord essayé de faire exclure la RASD, mais il n’a pas réussi. Alors il a adopté une autre stratégie : ne plus poser de conditions à son entrée dans l’UA. Mais ça ne veut pas dire qu’il y a renoncé », rappelle un observateur indépendant, estimant que cela risque d’ouvrir une lutte permanente au sein de l’institution panafricaine entre soutiens du Maroc et ceux de la RASD.

 

Du côté sahraoui, on met en avant les textes de l’UA, qui impliquent le respect par chaque Etat de la souveraineté des autres membres. « Concrètement, le Maroc a accepté sans conditions les principes et les objectifs contenus dans l’acte constitutif, et c’est pour cela que nous avons accepté qu’il intègre l’UA », explique Mohamed Salem Ould Salek, le ministre des affaires étrangères de la RASD, qui y voit pour les Sahraouis « une victoire diplomatique très importante ». « Le Maroc a quitté l’OUA en 1984 pour refuser la République sahraouie et il a fait pression pendant des années pour l’expulser mais il n’a pas réussi », avance M. Salem Ould Salek. « Maintenant nous allons veiller à ce qu’il respecte ses engagements au sein de l’UA. »

 

Avec Le Monde

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